Christian Grovermann1, Tesfamicheal Wossen2, Assane Beye3
1 : Institut de recherche en agriculture biologique (FiBL), Suisse ; 2 : Institut international d'agriculture tropicale (IITA), Mali ; 3 : Université Cheikh Anta Diop (UCAD), Sénégal
Les résultats préliminaires sont disponibles depuis juillet 2025 et font état d'impacts considérables. Les interventions ont utilisé le modèle des producteurs relais pour promouvoir une série de pratiques agroécologiques - y compris l'intégration d'arbustes comme fixateurs d'azote, le compostage, le paillage, l'apport de fumier et les rotations à base de légumineuses - visant à améliorer la productivité et la résilience des zones arides. Plus précisément, deux modalités de conseil ont été testées : un modèle à haute intensité comprenant la participation dans les journées paysannes un accompagnement continu et un soutien pour les producteurs relais pour la mise en œuvre des démonstration, ainsi qu'un modèle plus léger reposant sur la diffusion numérique et imprimée, en plus d'une participation limitée des producteurs relais dans les journées paysannes . Dans 180 villages et pour 1423 ménages, les deux modèles ont permis d'améliorer de manière significative la sensibilisation et l'adoption des pratiques par les producteurs, ainsi que d'augmenter es rendements.
Sensibilisation des producteurs relais : Après avoir participé aux journées champêtres organisées par le projet, chaque agriculteur chef de file a établi une parcelle de démonstration des pratiques, attirant en moyenne 19 producteurs par journée champêtre. Le partage informel des connaissances a étendu la portée totale à environ 40 producteurs par producteur relais, soulignant un fort effet multiplicateur.
Gains en matière d'adoption de pratiques : L'adoption de pratiques clés - y compris l'intégration des arbustes, le paillage et l'utilisation de la matière organique (compostage et fumier animal) - a augmenté de manière significative dans les deux modèles de conseil, intensif et plus léger. Au Mali, les deux modèles ont conduit à des gains substantiels de 26 points de pourcentage pour l'intégration des arbustes et d'environ 40 points de pourcentage pour l'utilisation du fumier. Le modèle intensif a en outre entraîné une augmentation de 36 points concernant le paillage, tandis que le modèle plus léger y a montré des gains plus modestes (8 points). Au Sénégal, le modèle intensif a conduit à des gains d'adoption de 24 points pour le paillage et de 14 points pour les cultures intercalaires, tandis que les gains pour l'intégration des arbustes, le compostage et le fumier variaient de 4 à 7 points de pourcentage.
Les données sur les augmentations de rendement déclarés (c.-à-d. en comparant les rendements, avec et sans adoption des pratiques) et les analyses économétriques utilisant des données mesurées au niveau des parcelles, y compris l'estimation des variables instrumentales, confirment que l'adoption de pratiques améliorées pour une intensification agroécologique a conduit à des gains significatifs de productivité et de stabilité des rendements.
Impact sur la productivité : L'adoption de pratiques améliorées s'est traduite par des gains substantiels en termes de rendements perçus et objectivement mesurés. Les producteurs ont signalé des augmentations de rendement de 150 à plus de 300 kg/ha, en particulier pour le fumier, le compostage et le paillage, avec des effets cohérents sur le millet et l'arachide. Ces gains autodéclarés ont été corroborés par les estimations basées sur les variables instrumentales des données mesurées, montrant des augmentations de rendement de 250 à 500 kg/ha pour les pratiques clés.
Impact sur la stabilité des rendements : Outre des rendements moyens plus élevés, l'apport de fumier, le paillage, le compostage ainsi que l'intégration des arbustes s'est traduite par une réduction significative de la variance des rendements, indiquant une amélioration de la stabilité de la production et une plus grande résistance aux chocs.
L'adoption combinée amplifie les effets : L'augmentation de l'intensité de l'adoption grâce à la combinaison des pratiques a produit des effets synergiques, permettant d'obtenir à la fois des rendements plus élevés et une meilleure stabilité des rendements. Les ménages qui ont adopté au moins deux pratiques ont connu les améliorations les plus marquées, et les ménages ayant adopté le plus de pratiques groupées ont enregistré les gains les plus importants en termes de productivité et de résilience.
Dans l'ensemble, les deux approches de conseil ont permis des gains mesurables en termes de sensibilisation, d'adoption et de productivité, le soutien intensif produisant des effets plus importants et plus durables.
L'intensité des conseils est importante : Les formations structurées, les parcelles de démonstration et l'apprentissage par les pairs ont toujours été plus performants que les modalités plus légères, la diffusion des connaissances s'étendant bien au-delà des producteurs relais et des participants aux démonstrations villageoises.
L'adoption groupée est plus efficace : L'adoption simultanée de plusieurs pratiques a produit des avantages synergiques, améliorant les rendements moyens et la stabilité des rendements. Les perceptions des producteurs correspondaient étroitement aux résultats mesurés, ce qui a renforcé la crédibilité.
La mise à l'échelle dépend de la modalité du conseil : Alors que les modèles intensifs ont un impact plus profond, les approches plus légères sont prometteuses pour une mise à l'échelle rentable, indiquant que les stratégies de conseil agricole échelonnées ou hybrides étaient les plus adaptées.
Bien que les producteurs aient exprimé une forte motivation à adopter des pratiques agroécologiques, des contraintes majeures subsistent :
Accès limité au matériel de plantation (en particulier aux plants d'arbustes): Cité par environ 35 % des producteurs.
Lacunes dans les connaissances et les compétences techniques: Signalées par environ 40 % des producteurs
Contraintes en matière de ressources: Y compris la main-d'œuvre, le temps et les ressources financières.
Ces résultats soulignent que si l'intention et la sensibilisation sont essentielles, l'adoption effective des pratiques d'intégration des arbustes nécessitera également des efforts soutenus pour combler les lacunes en matière de connaissances, améliorer l'accès à du matériel de plantation de qualité et réduire les obstacles économiques et logistiques qui entravent l'adoption de ces arbustes.
